vendredi 28 novembre 2014

La Messe de l'athée

La Messe de l’athée
de Honorée de Balzac

Dévouement et dévotion

Les éditions Manucius proposent une jolie petite nouvelle tirée des Scènes de la vie parisienne. Rédigé par Balzac dans la fièvre d’une nuit du début de l’année 1836, ce « jet de génie » (c’est l’éditeur qui le dit dans sa préface) est sans doute moins que le « miracle » annoncé. Ce n’est pas bien grave, mais pourquoi se sent-on toujours obligé de crier au miracle et de faire tout un flan à propos du moindre texte rédigé par un « grand écrivain » ? Est-ce qu’un texte comme celui-ci, étant donné sa genèse, plutôt sa spontanéité, ne pourrait pas se contenter d’être simplement charmant, ou même mineur, sans qu’on y voit scandal ? Certes, il faut vendre…

Revenons pourtant à cette Messe de l’athée, presque construite à la manière d’un roman policier. Le célèbre chirurgien français Desplein est un athée « comme les gens religieux n’admettent pas qu’il puisse y avoir d’athées » (indication qui m’a d’autant plus plu que ma propre mère, croyante, a longtemps refusé mon athéisme, incapable d’imaginer que la chair de sa chair ne puisse absolument pas croire en Dieu, et pas même en un dieu, même pas un tout petit peu) : « Desplein n’était pas dans le doute, il affirmait. » Or, voilà que le disciple, le « Séide », même, de cet imminent athée le voit entrer à Saint-Sulpice et s’agenouillant devant la vierge, la prier avec dévotion.

Epais mystère ! et dont la solution, cousue de fil blanc, ne surprendra que dans la mesure où elle est tout ce qu’il y a de moins surprenant : le bon docteur Desplein doit sa réussite à un homme, fervent catholique (et Auvergnat qui plus est !), dont il honore la mémoire en fondant quatre messes annuelles. 2 + x = 4, trouvez x

C’est bel et bien le « portrait exemplaire de la bonté, de la gratitude et de la fidélité » annoncé par la quatrième de couverture, mais pour le « miracle » et le « génie » de la préface, c’est peut-être un peu court… Reste pourtant un joli texte, une « Scène » sans autre prétention, sûrement, que d’en être une, une belle histoire et, notamment au début du texte, quelques réflexions intéressantes sur la postérité.

Et une question aussi : si comme le professeur Desplein, vous ne croyez pas en Dieu, et « encore moins à l’homme », rencontrer un homme bon qui vous fera croire en eux vous fera-t-il croire en Dieu ?



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