mardi 12 novembre 2013

Faits - Lecture courante à l'usage des grands débutants

Faits - Lecture courante à l’usage des grands débutants
de Marcel Cohen

L’anti-auto-fiction

Qu’on ne s’y trompe pas, les Faits de Marcel Cohen, n’ont rien d’une lecture courante et ne sont certainement pas à mettre entre les mains de débutants, même grands !

Ce qui se cache, sous ce terme générique, ce sont une centaine de scènes de vie, d’anecdotes tirées pour certaines, on peut l’imaginer, directement de la vie de l’auteur, pour d’autres de celle de personnages plus ou moins illustres, et pour la plupart de celle d’ « un homme », tout aussi indéfini que le titre du livre, et qui a le mérite de pouvoir être vous-même, ou bien alors quelqu’un d’autre, mais qui nous serait tout de même un peu familier. A travers elles, l’auteur semble se dessiner, comme la proximité de carreaux de mosaïque laisserait entrevoir une image. Mais il le fait tout en pudeur et en flou, afin qu’au lieu de s’exhiber, la relation de son expérience supposée personnelle tende plutôt à dire l’universel.

Scènes de la vie quotidienne

Il est difficile de parler de Faits ; il est certainement encore plus difficile de donner envie de le lire. Et pourtant, c’est un ouvrage qui vaut largement le détour – sans, encore une fois, qu’on sache vraiment dire pourquoi. Il n’y a pas vraiment de fil conducteur qui lierait entre elles chacune de ces cent vingt-trois historiettes de trois pages tout au plus ; à peine remarquera-t-on une certaines récurrence d’histoires de marins et à peu près autant de faits ayant pour cadre la seconde guerre mondiale et la déportation des Juifs. Pour la grande majorité, cependant, il ne s’agira que de scènes de la vie quotidienne et qui auront parfois un petit air de déjà-vu. Qu’en dire ?

Et fable moderne


Que dire aussi du style ? Et bien, finalement, que le style lui-même est peut-être ce qu’il y a de plus parlant pour décrire Faits. A première vue, il semblerait presque anodin : pas d’enluminures ou de jolies phrases, pas de bons mots, pour un peu, les dialogues tourneraient presque au médiocre (personne ne parle comme ça !). Et pourtant, Faits n’aurait pas pu être écrit autrement. C’est qu’ici, l’important n’est pas dans la forme – il s’agit uniquement d’aller droit à l’essentiel, à cet essentiel pour ainsi dire universel, intelligible par tous, comme une fable moderne, comme, finalement, un simple fait, un fait tout simple et tiré de la vie d’un homme qui pourrait être vous, ou moi, ou n’importe qui, et auquel on ne prêterait certainement jamais attention si le voir écrit devant nos yeux ne lui conférait une portée pour ainsi dire parabolique à laquelle on réfléchira parfois encore longtemps après que le livre sera refermé.

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